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Portraits
7 mai 2023
Le futur du télétravail – 90e Congrès de l’ACFAS 2023
Introduction par Diane-Gabrielle Tremblay
Les tiers lieux se sont beaucoup multipliés au cours des dernières décennies, tant au Québec qu’au Canada et à l’échelle internationale. Dans nombre de pays industrialisés de longue date, mais aussi dans des pays émergents, notamment en Asie du Sud-Est, le coworking serait devenu, depuis ces dix dernières années, un nouveau mode d’organisation du travail basé sur un espace de travail partagé, mis en place dans le but de favoriser les échanges et l’émulation créative entre les coworkers, et ce, afin d’alimenter l’innovation. Le coworking s’est relancé depuis la pandémie, mais les autres tiers lieux se sont aussi développés.
Dans ce colloque, nous nous intéresserons surtout aux espaces de coworking. Les espaces de coworking sont apparus vers le milieu des années 2000, à San Francisco dans le contexte de la Silicon Valley, du logiciel libre et du Web 2.0. Le coworking renvoie à un type d’espace et d’organisation du travail particulier ; il désigne à la fois le partage d’un espace de travail collectif (bien que les bureaux fermés et personnels se multiplient dans ces espaces récemment), mais aussi une forme de mise en réseau de travailleurs au sein du même espace favorisant l’échange, la collaboration, le réseautage dans un espace de travail donné (Fabbri, 2015). Le coworking s’inscrit dans le contexte plus large de l’émergence des « tiers-lieux » (Oldenburg, 1999 ; Scaillerez et Tremblay, 2016), soit des lieux qui se situent entre le lieu de résidence et le lieu de travail traditionnel.
L’objectif de ce colloque consiste à réunir des communications visant à analyser le phénomène de coworking dans divers contextes, soit différents pays, des espaces urbains, péri-urbains et ruraux, etc. Sont bienvenus tous les types d’approches, sur le plan théorique comme empirique. Nous sommes particulièrement intéressés par des comparaisons internationales, entre divers pays ou régions. Des revues des écrits théoriques seraient aussi bienvenues.
Diane-Gabrielle Tremblay, professeure, université Téluq
Le futur du télétravail sera hybride et commun. Les espaces de travail devront s’adapter aux différents besoins des télétravailleurs d’aujourd’hui et de demain. Il sera un lieu aussi essentiel qu’une bibliothèque. La proximité, l’abordabilité, la versatilité des services et la gestion de l’organisation seront des atouts pour créer un environnement de travail sain, où chacun et chacune pourra s’épanouir, s’exprimer et se développer à titre individuel et collectif. — Phi Nguyễn
J’ai eu l’honneur, lors du 90e congrès international organisé par l’ACFAS – qui fêtait cette même année son 100e anniversaire – de m’exprimer sur le futur du télétravail; Un sujet sur lequel il y en a long à dire. C’est effectivement un sujet des plus ambitieux, tant par rapport à sa complexité qu’aux multiples enjeux sociaux, environnementaux, territoriaux et économiques qu’il soulève.
Tout d’abord, commençons par ce fait indéniable : Depuis la crise sanitaire de la COVID-19, notre mode de travail tel que nous le connaissions (c’est-à-dire, métro-boulot en entreprise-dodo) a radicalement changé pour la grande majorité des travailleurs. Cette crise a eu un impact significatif sur le statut quo du monde du travail. Cela a affecté toutes les entreprises dites non essentielles, car soudain le travail pouvaitse faire à distance, donc à domicile.
Face à une crise d’une telle ampleur, les gouvernements d’états ont dû prendre des mesures extrêmes pour limiter la propagation du virus, notamment un confinement forcé qui a duré des années dans certains pays, dont le Canada.
C’est dans ce contexte nouveau et quasi surréel que les espaces de travail collaboratifs comme le Pop-up Lab ont commencé à gagner en popularité, jusqu’à devenir de véritables bouffées d’oxygène pour plusieurs. Une manière de retrouver cette vie sociale qui est si cruciale au bien-être de tout être humain, et qui nous avait si cruellement manqué durant la pandémie.
Ok, mais maintenant ?
La vision du télétravail que je souhaite exprimer ici est très personnelle. Elle est teintéede mon cheminement professionnel et de ma sensibilité aux associations qui œuvrentpour le bien commun et auxquelles j’ai souvent participé depuis l’âge de 14 ans. Ce que j’ai appris de cette crise sanitaire, c’est que nous pouvions faire preuve d’une résilience incroyable. Il n’en reste pas moins que cela a provoqué des séquelles au niveau de la santé mentale chez de nombreuses personnes. Face à ce constat, j’ai écumé de nombreux ouvrages littéraires portant sur les raisons qui pouvaient provoquer de la détresse chez les gens. J’en suis arrivé à penser que l’une des principales raisons était celle liée à notre environnement de vie et de travail.
Encore aujourd’hui, le travail occupe 75% de notre vie, ce qui est énorme ! Il va sansdire que ce dernier a un impact considérable dans notre existence. J’ai réalisé, en sondant les gens qui venaient travailler dans les espaces de bureau partagés communément appelés coworking, que la majorité d’entre eux aimaient leur emploi, mais que les conditions de travail dans lesquelles ils œuvraient étaient dysfonctionnelles, voir toxiques sur l’aspect humain. Ceci m’amène à penser que le problème, ce n’est pas le métier que l’on exerce en tant que tel, mais bien souvent notre environnement de travail.
Même les métiers dits de passion, comme la santé, l’enseignement, la création, la culture etc., ne veulent plus se contenter de conditions de travail inadéquates sous le prétexte de la vocation. L’opinion publique veut nous faire croire qu’on « ne travaille pas vraiment quand on fait ce que l’on aime par passion ou par dévouement », ce qui est totalement absurde. Le travail ne devrait pas rimer avec pénibilité, et surtout ne doit pas être subi avec mauvaise gestion de l’environnement de travail.
Par où commencer ?
Pour pallier les lacunes d’un environnement de travail déplorable, nous cherchons dans la mesure du possible à éviter d’y être exposés et d’en subir les conséquences. Ainsi, nous préférons rester à la maison quitte à ressentir de la solitude, jusqu’à ce que cela devienne insupportable : le confort de la maison devient un irritant étouffant. Le besoin de s’extirper de cette situation se manifeste, mais le rythme effréné du travail nous force à être en pilotage automatique. Nous oublions alors presque la raison pour laquelle nous aimons tant notre travail, nous n’avons plus le temps de savourer les fruits de notre labeur car la pression vient désormais de l’environnement de travail et du carcan qu’est devenue la maison.
En tant qu’êtres humains à multi-facettes, nous naviguons entre nos humeurs, nos intérêts et nos modes de vie. Tous ces facteurs peuvent affecter notre travail et vice versa; nous savons secrètement que nous avons besoins de plusieurs espaces de vie pour nous épanouir. C’est pourquoi travailler toujours au sein du même lieu, qu’il s’agisse de la maison ou du bureau de l’entreprise, ne peut tout simplement pas répondre à toutes nos aspirations.
L’avenir du télétravail est, selon moi, la combinaison de plusieurs besoins et critères.C’est avoir la possibilité d’un lieu où l’on se sent bien pour travailler, socialiser, apprendre et se réaliser individuellement et collectivement. Les espaces de travail partagés peuvent s’avérer être la solution qui répond à plusieurs de ces critères. Ils offrent la conciliation entre le confort de la maison par leur décor, le divertissement par leurs événements, les avantages du bureau par leur fonctionnement et le côté social par les interactions nourrissantes que l’on y retrouve. N’en tient qu’à nous de nous approprier ces espaces selon nos envies du moment.
Références
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